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La tête entre les mains, à ma table claire en formica ondulé. Je suis sous les toits. le zinc tiède de la chambre de bonne ? le roof écaillé et granuleux d’une coque de noix nommée Stella Maris ? C’est flou, c’est chaud, me retourner, tourner ma tête, regarder ailleurs que sur la surface lisse m’est impossible.

Le point rouge qui me démange au milieu du ventre est en fait le siège du cocon originel d’un joli petit ver. “Appelez moi le parasitologue !” ça y est je reconnais l’endroit. Je suis dans le département de virologie de mon hôpital populaire. Avicenne. La Courneuve.

“Leonard Cohen : Who by fire”

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Tout à l’heure j’étais assise sur le trottoir, pas très loin du port. Je ne sais plus si j’étais à Ilha Marajo ou Gran Roque, chez Dona Magali. Mais ils m’avaient attaché un ballon rouge en forme de cœur pour que je ne me perde pas. Ensuite, ils avaient porté mes sacs jusqu’à l’hôpital. Je ne pouvais plus rien porter. à peine moi. mon corps refusait. A mes pieds, nous avions trouvé un sac ouvrant la brèche, géante, profonde, fascinante sur ma folie toute entière.

C’est moi tout ça ? Je ne savais pas, je ne me souviens pas.

j’entends tout à coup un grand clac. Le ballon du skateur a été claqué par une voiture qui passait. Il traine une ficelle et son débris de caoutchouc. lève un bras, agacé et file.

Il fait froid dorénavant. la brise se lève dans les rues de cette ville portuaire.

“Matisyahu : Silence”

A l’hôpital, le dédale qui mène jusqu’au box qui me semble dédié me rappelle la pierre sale et malodorante des mûrs humides d’Essaouira-la-bleue. Un relent de Midnight Express.

Dans cet univers de couleurs, je reconnais la photo de Hunger.  Jaune, ocre, verdâtre, olive, noir… noir… Qu’est ce que je serai fière si j’étais à l’origine de ce film. la beauté du contraste me faisait oublier mon voyage immonde dans ce qu’est mon cauchemar.

Au fur et à mesure, dans les couleurs où j’avance, ceux que je croise ont parfois le visage en noir et blanc.

 

hunger

 

Allongée sur une raide banquette en toile. le tissu rêche et foncé pour seul contact. Je suis dans un espace-temps entre-deux. Rue saint-Maur ? rue de l’université ? dans l’entrée de cet appartement, je ne peux même pas me lever pour ouvrir la porte, répondre à l’interphone. mes muscles ne répondent pas. Mes yeux sont secs, rouges. ma tête cogne et soudain …

Je ne maitrise plus RIEN.

Je ne distingue plus le vrai du faux. la raison de la folie.

Je crois que c’est ma mère qui entre, me secoue comme un sac de plomb. Je ne peux rien faire. ça hurle. Toujours la même rengaine : “tu t’es encore droguée !… On va voir si tu ne peux vraiment pas bouger”. Elle pose l’oreiller sur ma tête, s’assied dessus. calmement.

J’étouffe… je ne peux rien faire. mon corps entier me fait mal. Bouger ne se peut. pas un son ne sort.

L’air me manque. Je meurs. tuée. A force de crier au loup.

“Moriarty : fireday”

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Derrière moi, devant la porte blanche qui réfléchit sa lueur sur la table en formica, un homme approche. “Je suis parasitologue. Ce qui vous arrive est audacieux mais normal. Le ver qui s’est installé dans votre ventre a induit la synthèse accrue d’un recapteur de l’hypocrétine-1."

“C’est grave docteur ?”

“Une parasomnie en sommeil paradoxal ? non, c’est sans importance mais, en revanche, rapport à ce que j’ai vu sur vos résultats d’analyse, vous allez mourir rapidement, rassurez-vous, ça sera fulgurant. C’est votre oncle de Paris, que j’ai connu par hasard qui m’a transmis ces données. ”.

“Nina Simone : blackbird”

 

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Une griffe mignonne sur mon pied qui dépasse de sous les draps. la chaleur de ce corps qui me serre, me contient. Une main brulante, celle qui est sous l’épaisse couche. Une main gelée, celle qui traine au-dehors.

Il fait grand jour, 13:58

Troisième réveil – éveil pour aujourd’hui.

je tends le pieds. ça bouge. tourne un bras, ça bouge. Alléluia !

je rentre ma main froide sous la couverture. Chaud.

“Patrice : soulstorm”